La 9e édition du festival Aflam se tiendra du jeudi 24 mars au dimanche 3 avril 2022. Questionner l’Histoire, et interroger la complexité des identités par le cinéma, c’est ce que propose cette 9e édition au travers de 40 films provenant d’une douzaine pays de la vaste région des pays arabes.
Aflam revient dans les salles de cinéma pour la première fois depuis 2019, après deux ans d’interruption des rencontres avec le public et différentes propositions en ligne. Un retour en salle où nous retrouvons enfin l’espace d’échange et de débat qui nous a tant manqué, chaque séance étant accompagnée d’un débat du public avec les cinéastes, pratiquement tous présents pour accompagner leur film. Pour cette nouvelle édition, la direction artistique d’Aflam s’est organisée de façon collégiale pour proposer une sélection riche, exigeante, de fictions et de documentaires longs et courts souvent inédits, venant s’ajouter aux films déjà à l’affiche dans les salles de cinéma, où ils trouvent, enfin, depuis quelques années une place plus importante.
Cette sélection nous invite à penser et changer notre regard sur le monde, ses constructions politiques et mémorielles à travers des films aux écritures affirmées. L’image d’archive comme matériau se présente comme l’un des piliers de ce programme, avec des films qui explorent la mémoire des luttes, du Maroc (Avant le déclin du jour d’Ali Essafi) au Proche-Orient (Mapping Lessons de Philip Rizk) : ce faisant, c’est l’histoire même du cinéma qui se trouve détournée et nouvellement agencée.
Ce réemploi des images du passé contraste avec un ancrage fort dans le présent, que représentent des films comme 40 années et une nuit de Mohamad Alholayyil ou Les Filles qui ont brûlé la nuit de Sara Mesfer. L’émergence d’une production chaque année plus importante en Arabie Saoudite témoigne en effet d’une critique sourde, nous offrant l’image d’une profonde remise en question de l’ordre social.
L’exil impose aussi aux films de nouvelles dynamiques formelles qui se traduisent dans l’art de raconter, avec des films notamment syriens, qui offrent au récit de nouveaux espaces de transmission (Notre mémoire nous appartient de Rami Farah ou One of Us Left the Photo des Frères Malas). Ailleurs, porté par une diversité de gestes cinématographiques, apparaît la revendication du droit à la différence, pour avoir une place dans la société – en tant qu’homosexuel, en tant que femme, en tant qu’artiste – avec des films déjà célébrés comme Miguel’s War d’Eliane Raheb ou Death of a Virgin and the Sin of Not Living de George Peter Barbari.
Le festival lance par ailleurs cette année une nouvelle ligne programmatique autour du cinéma de patrimoine des pays arabes, qui est amenée à se déployer au fil des ans et des éditions. Épousant l’histoire des solidarités transnationales et la mémoire des luttes d’indépendance, la 9e édition d’Aflam concentre son regard sur le combat des Algériens, qui célèbrent cette année les 60 ans de l’indépendance de leur pays, et sur la résistance des Palestiniens, toujours d’une actualité tragique. Les films de René Vautier, de Monica Maurer, de Cécile Decugis, de Marc Ferro et Marie-Louise Derien et du trio Jean Chamoun, Pino Adriano et Mustafa Abu Ali nous ramèneront à une époque où la lutte pour la liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes n’avait pas de frontières. Un autre axe programmatique présentera le travail des premières femmes documentaristes de la région – Nabiha Lotfy, Sophie Ferchiou, Atteyat Al-Abnoudi et Assia Djebar -, en lutte elles aussi pour une écriture différente de l’histoire.
Tisser des liens entre les œuvres et les publics a toujours été au cœur du projet d’Aflam, donnant lieu ces dernières années à la constitution d’un réseau professionnel euro-arabe autour de la médiation culturelle. Cette édition est l’occasion d’inviter sept pays partenaires pour faire du festival un espace d’expérimentation et de réflexion sur les pratiques de transmission et de médiation. Des propositions fortes sont ainsi organisées en résonance avec la programmation cinéma sous la forme de lettres filmées par des jeunes de Béjaïa adressées à ceux de Marseille, ou encore d’une création collective avec un public mixte dans le contexte carcéral des Baumettes. Véritables soubassements de l’évènement, apportant souffle et espoir sur notre capacité à faire ensemble, ces ateliers donneront lieu à des échanges au fil de la semaine.
Enfin, Aflam accueille un invité d’honneur. Incarnant la naissance d’un nouveau cinéma algérien avec Omar Gatlato dans les années 1970, Merzak Allouache n’a jamais cessé de filmer, avec acuité et tendresse, la vie de ses concitoyens, en s’attachant particulièrement aux jeunes et au combat des femmes pour leur liberté et la démocratie dans leur pays. Cinq de ses films, portés par Hassen Ferhani et Nabil Djedouani seront présentés au Mucem. Précurseur d’une jeune génération de cinéastes, Merzak Allouache dialoguera avec eux pour parler de cinéma, le sien, le leur, à la suite des projections et lors d’une Masterclass qui clôturera cette rétrospective.
Texte de Souad El Tayeb, Présidente d’Aflam ; Charlotte Deweerdt, Solange Poulet et Mathilde Rouxel, Direction artistique du festival
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