Emission Aux Ressources – Hors Série – conçue et animée par Jeanne Guien
On croit que c’est normal, on n’y pense pas, et puis… Une sociologue nous en parle.
En France, les femmes consultent régulièrement – une fois l’an, parfois plus – un.e gynécologue, qui les « suit » pour la contraception, l’examen de l’appareil génital, le dépistage des cancers du sein, du col de l’utérus, des MST et IST… Ce, même si elles ne souffrent pas, ne soupçonnent pas de grossesse, ou ne présentent pas de facteur de risque particulier.
De leur côté, les hommes ne vont pas se faire vérifier à intervalles réguliers l’appareil génital, l’appareil hormonal, ou leurs diverses glandes. Ils n’ont pas d’interlocuteur.rice spécifique lorsqu’il s’agit de choisir une contraception ou d’évoquer les changements physiologiques liés à l’âge. Ils ne sont pas « suivis » par un.e « andrologue », qu’ils consulteraient par évidence, par habitude, par obligation sociale.
Cette obligation sociale fondamentalement genrée, c’est ce qu’Aurore Koechlin identifie et appelle « la norme gynécologique » : seule les femmes sont contrôlées régulièrement par des médecins qui les considèrent comme une population naturellement à risque. Sur le terrain, ces professionnel.les travaillent à les rappeler sans cesse à cette norme, à les y conformer. De leur côté, les femmes apprennent à surmonter l’étrangeté, l’angoisse, le stress et souvent la douleur engendrés par ces incessants « contrôles », « de routine » ou pas.
Ces professionnel.les et ces patientes, Aurore Koechlin les a observé.es et écouté.es pendant plus de 3 ans. A l’appui de ces recherches, elle nous raconte les processus historiques qui ont conduit à l’établissement de cette « norme gynécologique », et à son oubli comme tel ; elle témoigne des discriminations et inégalités qui accompagnent l’exercice de la profession gynécologique, qu’elle ait lieu en clinique, en PMI ou aux urgences hospitalières ; elle formule des revendications pour les luttes féministes et pour l’amélioration des systèmes de santé.